100 jours de Raymond Ndong Sima à la Primature : Bilan et perspectives

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Nommé Premier ministre, chef du gouvernement le 27 février 2012, par le président de la République, Chef de l'Etat Ali Bongo Ondimba, en remplacement de Paul Biyoghé Mba , l'ancien ministre de l'Agriculture du gouvernement sortant, Raymond Ndong Sima qui se trouve à la tête d'un gouvernement dit « de missions » fort de 29 membres, a totalisé 100 jours de Primature le 6 juin dernier.

Soit 54 jours seulement après le vote de confiance de l'Assemblée nationale consécutif à sa Déclaration de politique générale fixant le cap sur la mise en oeuvre du Plan stratégique du développement du Gabon.

Dans un point d'étape, il lève ici, le voile sur sa méthode de travail pour résoudre au mieux, les problèmes politiques, économiques, sociaux et culturels qu'il a trouvés sur la table du gouvernement et répondre ainsi aux nombreuses attentes de ses concitoyens.

 

Question : Monsieur le Premier ministre, vous venez de boucler vos premiers 100 jours à la tête du gouvernement, un challenge certainement sans repos à cause de nombreux problèmes jugés récurrents dans des domaines de l'Etat de droit, de l'Administration, de l'Education, de la Santé, de la Sécurité, de l'Emploi, des Infrastructures, d'adduction d'eau et d'électricité notamment. Vous vous êtes tout de suite mis au service de la nation en travaillant avec dextérité pour mériter la confiance du Chef de l'Etat et en imprimant votre méthodologie basée sur la concertation et le diagnostic. Comment avez-vous abordé ces différentes situations et qu'avez-vous pu faire jusqu'ici durant ce laps de temps ?

Réponse : « C'est vrai ma méthode est basée sur la concertation. Mais un deuxième volet qui est le pragmatisme. Je suis un homme pragmatique, de terrain. Je ne viens pas avec des idées toutes faites. Je regarde et je me forme une opinion sur les lieux. Mais dans la plupart des cas il est mieux d'associer les gens pour trouver des solutions à un problème, de partager avec eux le diagnostic qui est posé et de chercher avec eux des solutions aux problèmes qui se posent.

Dans la première partie de ma Déclaration de politique générale, il y a eu beaucoup de questions. ces questions avaient pour but de susciter l'attention., d'appeler la conscience de chacun, de veiller à l'intérêt des uns et des autres autour des points qui semblent devenir normaux, anodins alors qu'ils sont essentiels dans le fonctionnement de l'Etat et donc des points pour lesquels avant de proposer une solution il me parait essentiel que chacun participe à la détermination ou à l'évaluation de la situation, en quelque sorte à l'exercice de diagnostic pour enfin être capable de s'impliquer dans la recherche des solutions et de se sentir parfaitement concerné par la solution retenue. Ainsi par rapport au pont endommagé à Kango par une barge, je suis allé sur place voir ce qui se passait. Je me suis concerté avec le Ministre en charge des infrastructures et la solution technique qui a été arrêtée est une solution qui a consisté à mettre transitoirement en place des bacs pour permettre aux automobilistes qui arrivaient de continuer à passer de part et d'autre de ce pont.

Mais elle a consisté aussi à déployer sur un axe de déviation Kougouleu-Medouneu-Sam-Bibasse à mettre un ensemble d'entreprises pour reprofiler et rouvrir cet axe routier de façon que les véhicules arrivant du Nord ne soient pas totalement bloqués. Ajouté à cela un dispositif qui a été mis en place avec le train pour transporter les véhicules depuis la gare de Ndjolé jusqu'à celle d'Owendo et vice versa. Ce sont là des solutions de court terme. Naturellement sur le long terme il faut une solution beaucoup plus durable. Celle-ci peut se situer dans le moyen comme dans le long terme.

 A moyen terme c'est clair qu'il faut refaire la pile et pour refaire cette pile il faut trouver un ensemble de dispositif technique permettant de soutenir l'ouvrage qui existe de sorte que les travaux puissent s'effectuer en toute tranquillité. Le ministre de l'Equipement vous a dit que nous avons acquis un pont métallique qui va être placé à côté de celui qui se trouve à l'heure actuelle à Kango, pour avoir la possibilité de travailler sur le fond à partir de la pile elle-même jusqu'à la plate-forme, afin que le tablier puisse être remis dans une position correcte.

C'est une solution qui prend un peu de temps. Les équipements ont été achetés et ils arriveront au Gabon en fin juin début juillet, en fonction du plan de navigation des navires. Nous avons des besoins mais nous devons nous assurer si c'est compatible avec les moyens financiers dont nous disposons. Dans un premier temps, on rétablit le pont actuel dans sa fonctionnalité intégrale. Et mettre une étude en place pour voir s'il y a possibilité d'ouvrir une autre voie. Sinon à terme, il faut une deuxième voie à cet endroit ».

 

Question : Et à propos de la crise qui secoue le monde universitaire depuis des mois ?

Réponse  : «  Depuis plusieurs mois et bien et avant même mon arrivée à la Primature, les mouvements d'humeur étaient observés au sein de l'Université Omar Bongo. Ces mouvements se sont un peu interrompus pendant la CAN2012 pour reprendre au lendemain de la CAN. Le Ministre de l'Education nationale a entrepris plusieurs démarches en direction des différentes parties en conflit, c'est-à-dire les enseignants et les étudiants.

 Et ces nombreuses interventions ont permis d'avancer afin que nous arrivions à une solution permettant de pouvoir sortir définitivement de la crise. Il m'est apparu dans les dernières semaines que l'on était en présence d'une certaine crispation parce que certaines parties au conflit, ont tendance à radicaliser leur position tout simplement. Mais quand des gens parlent il arrive que la façon de s'exprimer irrite ou agace les gens qui sont en face et vice versa, il arrive que les arguments des uns et des autres ne soient pas reçus juste parce qu'on a maintenant un sentiment d'agacement par rapport à son interlocuteur. Mais pour autant ça ne veut pas dire que, et d'un côté et de l'autre, les raisons du mécontentement ou bien les propositions qui sont faites sont non fondées ou sans intérêts ».

 

Question  : Mais, Monsieur le Premier ministre, les réclamations persistent à l'UOB. Ne risque-t-on pas une année blanche ?

Réponse : « La persistance des réclamations à l'université indiquent que plusieurs parties prenantes à l'université ne sont pas satisfaites. J'ai donc décidé de venir en renfort au ministre de l'Education nationale qui, je le répète, a déjà fait plusieurs propositions en vue d'une solution acceptable au problème qui était posé.

C'est ainsi que j'ai eu à rencontrer toutes les composantes qui interviennent à l'université : trois groupes d'étudiants à tour de rôle sans discrimination, les autorités rectorales et les syndicats de ce secteur. Ma démarche était d'écouter tout le monde et de ne pas fermer une porte afin que tout le monde puisse s'exprimer malgré le problème de représentativité qui revenait souvent entre étudiants. Une étape nécessaire qui nous a permis d'avoir un éclairage et de magnifier la force du dialogue.

 J'ai fait la synthèse de ces échanges au cours desquels les gens ont exprimé ce qui était dans leur coeur que j'ai transmise au président de la République, avant que je convoque une réunion d'ensemble, pour toutes les parties en même temps car, c'est l'intérêt de tout le monde de chercher le consensus, de trouver une solution durable et de quitter les positions extrêmes.

Venir vers un centre qui est un dénominateur commun. C'est cela le bon sens. Il y a dans les revendications des étudiants et dans les revendications des enseignants des points qui sont consistants Comme il y a des positions que le ministère ou l'Agence nationale de bourses ».

 

Question : Monsieur le Premier ministre, nous n'occulterons pas le problème des échangeurs qui avaient déjà réjoui les compatriotes pendant leur lancement au moment de la CAN2012 ? 

Réponse : « Vous évoquez la question des échangeurs, il ne vous a pas échappé que les travaux ont repris sur ces échangeurs. Mais effectivement lorsque je suis arrivé ces travaux étaient arrêtés par ce le sujet était en discussion entre l'Agence nationale des Grands travaux (ANGP) qui avait été chargé de superviser lesdits travaux et la société SOCOBA, adjudicataire des travaux.

 Je pense que l'ANGT avait interrompu le financement des travaux, afin de vérifier et de faire le point de ce qui avait été fait jusqu'ici. Ces vérifications ont mis un peu de temps. Je pense que dans les mois qui viennent ces échangeurs seront définitivement livrés. Il vaut mieux un peu perdre le temps et terminer quelque chose de bien plutôt que de faire les choses dans la hâte et regretter après coup ».

Question : Sur votre table de travail, vous avez trouvé des dossiers très importants à l'exemple de l'audit de la Fonction publique et la régularisation des différentes situations administratives des agents de l'Etat. Où en êtes-vous exactement ?

Réponse : « J'ai signé près de 400 textes de mises à la retraite et un peu plus de 2000 textes d'intégration, de titularisation et de reclassement dans la Fonction publique. Certaines situations qu'on a purgées maintenant correspondent en réalité à des dossiers que l'on a laissé trainer depuis 2003-2004. Nous allons conduire cet exercice jusqu'à son terme parce que l'Etat est un employeur et en sa qualité d'employeur, il a exactement les mêmes obligations qu'un employeur privé vis-à-vis de ses salariés. Il doit se mettre à jour vis-à-vis d'eux. Certains vont se demander si ces fonctionnaires sont nécessaires là où ils se trouvent. Mais dès lors que des gens ont été recrutés, leur situation administrative doit être tenue à jour. C'est une nécessité ».

 

Question : Jusqu'ici, Monsieur le Premier ministre, vous n'avez encore rien dit sur l'habitat. Vos compatriotes voudraient vivement ce qui se passe dans ce domaine qui enregistre un déficit criard ?

Réponse  : « Sur l'Habitat comme sur l'Education, c'est un dossier dont le Chef de l'Etat a organisé un Conseil présidentiel. Au terme de ces deux conseils, le président de la République m'a chargé de prendre en main, la mise en oeuvre concrète des propositions qui ont été faites pour solutionner les problèmes sur la table du gouvernement.

 Cela m'a amené à réunir rapidement toutes les parties prenantes ; c'est-à-dire, le ministère de l'Habitat, l'Agence nationale des Grands Travaux, les administrations et les sociétés concernées par ce dossier. J'ai signé ensuite, le 31 mai 2012, le lancement des travaux sur le premier site de SHM sur lequel il va y avoir un millier de logements dont les travaux doivent démarrer au cours de la première quinzaine de juin.

J'ai signé une deuxième série de logements pour un deuxième marché avec l'ANGT qui concerne le site d'Angondjé dont les travaux doivent démarrer dans la même période puisque tous les matériaux se trouvent déjà sur site. A ce niveau, on peut noter des avancées significatives. Moi je ne marche pas sur la pression telle qu'elle est faite, je marche sur des solutions durables.

 Il y a des débats de fond que nous avons esquivé entre Gabonais sur lequel il est nécessaire de revenir. Par exemple, est-il normal aujourd'hui que dans le centre-ville, on continue à construire des villas individuelles ? Est-il même raisonnable que même dans les périphéries, les gens continuent à construire des villas individuelles. Il est temps de faire ce qui se fait dans les grands centres urbains. C'est-à-dire des maisons qui montent jusqu'à 3, 4, 5 ou 6 niveaux de façon qu'on puisse recevoir un plus grand nombre de personnes.

Question : Vous portez la veste de Premier ministre depuis 100 jours. Quel effet que cela vous fait et comment vous organisez-vous ? Vous êtes le Patron de l'administration, la Réforme de l'Etat très rattachée à la Primature, l'audit de la Fonction publique et bien d'autres problèmes. Votre réaction ?

Réponse : « Dans toute démarche il est important de hiérarchiser les priorités et de prendre les problèmes dans un ordre logique. L'administration est au coeur de toutes les polémiques et critiques dont l'Etat fait l'objet. Mais l'administration c'est nous tous qui en faisons partie. En tout cas une grande partie d'entre nous.

 Avant de commencer à demander des changements à cette administration il est essentiel de regarder comment elle se présente, dans quelle situation elle se trouve. Et comme vous le savez, un exercice extrêmement important a été entrepris depuis 2010 visant à faire l'audit de l'ensemble de la Fonction publique. Beaucoup ont cru que ce travail avait été un gag ou qu'il n'avait pas eu lieu ou que pour protéger les un nous n'allions pas aller jusqu'au bout de l'exercice.

Je vous assure que l'exercice a été conduit jusqu'à son terme de façon très professionnelle. Et, j'ai tout simplement demandé aux équipes qui ont conduit ce travail de m'en faire la présentation. Les mêmes équipes ont présenté les conclusions de cet audit à l'ensemble de la haute administration (secrétaires généraux, directeurs généraux, directeurs centraux des personnels). Ces conclusions ont porté sur plusieurs aspects : la qualité, le positionnement de tout agent....

En tout cas, l'audit donne un éclairage tout à fait nouveau et intéressant sur la structure de notre administration, sur l'état des personnels. Qui est et qui n'est pas fonctionnaire ? Où se trouve tel ou tel fonctionnaire et à quel moment ? Toutes ces questions ont été abordées par l'audit. On sait combien nous sommes.

On sait que dans telle administration il y a des gens qui sont sous employés alors que leur qualification est relativement ou très élevée même. On sait que d'autres personnes sont à des postes pour lesquels elles ne sont pas tout à fait qualifiées. Mais cet audit n'est qu'une étape, on doit en tirer des conclusions. L'idée est de ramener l'Etat à des formes normales.

Je me suis laissé dire que les sept cantines que j'ai reçues et que j'ai épurées ne représente qu'une petite partie de ce que je vais recevoir les jours à venir. Mon objectif : Je serai heureux lorsqu'au terme de cet exercice, tous les agents seront revenus dans des situations et dans des temps normaux par rapport à leur situation administrative. L e troisième point que vous avez évoqué est que j'ai trouvé un service le contrôle général de l'Etat qui était rattaché à la Primature.

 L'exercice que j'ai fait récemment est un exercice de restructuration. Il s'agit de renforcer l'entité dite du contrôle général de l'Etat et de la doter de trois instruments : une Inspection générale des affaires administratives ; une Inspection générale des services techniques et une Inspection générale des services des finances. Parce qu'il n'est pas normal que je sois entrain de purger une situation qui date de 10 ans, avoir des fonctionnaires qui sont restés 10 ans sans être titularisés ni avancés.

 Ici un contrôle général de l'Etat est un audit interne, sa fonction doit être en permanence d'aller vérifier que sur le plan administratif, les procédures sont suivies et que les gens qui sont chargés de ce travail le font effectivement dans tous les ministères. Il en est de même de l'Inspection générale technique : aujourd'hui, quand on construit un bâtiment qui appartient à l'Etat, comme ça peut être aussi la construction d'une route ou toute autre action dans un hôpital, lorsqu'un acte technique est posé, quels sont les moyens dont dispose l'Etat pour s'assurer que cet acte technique a été posé dans les règles de l'art. L'audit interne est donc un outil de vérification du bon fonctionnement de l'Etat dans un domaine précis.

Enfin il existe une Inspection des finances pour assurer l'audit de l'exécution financière du budget. Cette opération consiste à mettre ensemble un corps d'audits de contrôle et de suivi des actes de l'Etat. Dans les semaines et mois à venir ce corps va se mettre en mouvement ».

Question : Monsieur le Premier ministre, les Gabonais vivent dans l'insécurité partout aujourd'hui, le gouvernement a toujours promis de mettre les bouchers doubles pour endiguer ce phénomène nanti de crimes , de braquages et même de vols et viols manifeste, dans un pays où l'on parle peut-être maladroitement de vie paisible. Votre réaction ?

Réponse  : « La sécurité est un problème particulièrement sérieux. Le chef de l'Etat a pris des décisions extrêmement importantes. Je vous rappelle que dans les années 2011, aussi bien la gendarmerie, que l'armée, que la police, il a procédé aux recrutements très importants afin de rajeunir considérablement les personnels de ces différents corps. Toutefois, même si vous recruter trois ou quatre fois plus de policiers, ce n'est pas pour autant que les criminels arrêteront de poser des actes criminels. Il y a un problème d'éducation collective et de mentalité générale.

 Il y a un problème de dépravation des moeurs qui fait qu'aujourd'hui on assiste à toute sorte d'actes crapuleux. Ce que certains qualifient parfois abusivement de rimes rituels pour moi ce sont des crimes et ces crimes-là sont dans beaucoup de cas, des crimes de sang et doivent être poursuivis et réprimés avec la plus grande sévérité. Maintenant lorsque les procès sont ouverts et lorsque ces personnes se seront expliquées devant les magistrats, on pourra mieux qualifier ces crimes. Mais peu importe le qualificatif, nous avons un problème global de sécurité.

On peut aussi se demander si nous n'amplifions pas le niveau de criminalité au Gabon. Moi j'ai été dans beaucoup de pays et je ne suis pas certain que le nombre de crimes que l'on observe chez nous dans une ville qui s'est rapidement urbanisée dépasse ce qui se passe ailleurs. Peu importe ceux qui sont relevés sont déjà excessifs parce que nous sommes un pays de bonne quiétude et de paix, tout ce qui se passe à l'heure actuelle n'est véritablement pas acceptable ».

 

Question  : vous avez évoqué le problème d'aménagement de nos villes. Où en est le gouvernement avec le dossier SOVOG sur le ramassage et le traitement des ordures ménagères ?

Réponse : « Avec SOVOG il y à noter quelques avancées mais pas suffisantes à mon goût. Je m'étais effectivement rendu à Mindoubé parce que lorsque j'ai pris mes fonctions tout était à l'arrêt. Il n'y avait plus d'accès au site et la société ne parvenait plus à franchir une partie de la route qui conduisait à la décharge. Les travaux ont été faits. La route est désormais ouverte. Il a également été procédé au déguerpissement des personnes qui étaient à l'intérieur de la décharge. Ce n'est là qu'une avancée partielle.

Le vrai problème qu'il faut installer une usine de traitement des déchets car on ne peut pas simplement continuer à stocker les déchets Il faut trouver un lieu où on va d'abord les traiter pour prendre en charge la ville de Libreville mais aussi Owendo qui vient à Libreville parce qu'il n'y a pas de décharge là-bas. Il faut donc qu'un site soit travaillé et qu'une usine de traitement soit installée.

Nous avons eu plusieurs discussions sur ces questions-là et je ne voudrais pas anticiper sur les conclusions auxquelles nous sommes parvenues. Le temps que nous avons gagné en déguerpissant les occupants de la décharge doit nous permettre de mettre à profit l'installation de l'usine de traitement. Je crois là, aussi que dans quelques semaines ce dossier va connaître une avancée significative ».

Question : après avoir fait le tour des nombreuses préoccupations de vos compatriotes, quel message adressez-vous à toutes les populations du Gabon et quels sont les perspectives de votre équipe gouvernementale ?

Réponse  : « Je pense qu'en toute chose il faut savoir faire preuve de méthode et de patience. Beaucoup de choses que nous observons dans notre pays ont des décennies derrière elles. Et il serait illusoire de penser que ces problèmes pourraient être résolus en une journée. Devant la critique qui m'a été faite où certains estimant que je n'avance pas assez vite.

Si les choses étaient faciles je crois que mes prédécesseurs l'auraient fait car ce n'est pas la volonté qui leur a manqué. Sur la réforme de l'Etat par exemple, si vous lisez les déclarations politiques des quatre Premiers ministres qui m'ont précédé à la tête des gouvernements, vous vous rendrez compte que la réforme de l'Etat vient toujours depuis plus de 20 ans. Naturellement il serait naïf voire prétentieux de ma part de croire que je peux en une semaine ou en 15 jours régler ce problème.

 Il faut se demander pourquoi cette réforme dont on a tant parlée est-elle devenue une arlésienne. On en parle mais on ne la met pas en oeuvre ; d'où d'ailleurs le sens de ma démarche qui a consisté à dire que je ne viens pas imposer un schéma je viens d'abord questionner Comment voyez-vous la réforme. Certains ont dit que je manquais d'idées et que c'est pour cela que je posais la question. Mais pas du tout, c'est manquer de lucidité de dire que je n'ai pas d'idées.

 Non. Je suis venu en étant très lucide en me demandant pourquoi ces personnes avaient parlé de réforme et n'avaient pas réussi à la mettre en oeuvre. Cela veut dire qu'ils se sont confrontés à des blocages dans les différents compartiments de l'Etat qui étaient impliqués dans ces réformes. Donc la meilleure façon d'aller droit à ce problème c'est de questionner les gens. Dans ce cas et au nom du pragmatisme, il faut prendre la peine d'analyser les choses, de les regarder calmement et de se donner la patience qui permet de les aborder.

Les gens ont beaucoup attendu en ce qui concerne les logements. Il faudrait qu'on parte avec 1000 logements, chiffre planché, cette année. Et qui sait, peut-être serons-nous à 1200. Dans le moyen et long terme il faut savoir que personne ne viendra de l'extérieur corriger le Gabon. Lorsque les critiques sont proférées contre quelque chose d'excessif, on sait que tout ce qui est excessif est dérisoire. Nous devons être positifs. La critique si elle éveille les consciences, elle ne doit pas devenir un facteur de refus d'agir ou tout simplement d'incitation à la révolte ».

 

Question : Que dites-vous de l'élection contestée au Conseil économique et social (CES) ?

Réponse : « Le CES est arrivé au terme de son mandat avant mon arrivée à la Primature. L'élection a été contestée. Je rappelle que le recours portait sur une question de procédure parce qu'il avait été utilisé une loi qui n'était pas encore promulguée. Naturellement dès mon arrivée, je me suis rapproché de la Cour constitutionnelle afin d'éviter les erreurs commises et de remettre les choses sur la bonne voie.

Nous avons suivi les conseils de la Cour constitutionnelle. On a fait promulguer la loi, on a créé un décret et des arrêtés ont également été pris pour l'application de cet arrêté. Une partie des délégués avait déjà été identifiée dans les différents groupes. Dans le doute, nous avons pensé que ces délégués avaient été choisis par ces groupes et qu'ils pouvaient servir pour l'élection finale.

J'ai pris la peine de consulter la Cour constitutionnelle pour lui demander si ces délégués-là qui avaient été identifiés dans le cadre d'une loi mal promulguée étaient légitimes. L'avis de la Cour était de reprendre les élections dans l'intégralité. Voilà pourquoi j'ai demandé à toutes les parties de reprendre l'intégralité du processus électoral. Nous avons repris ce processus et de nouveau il y a des réclamations ici et là. Pourtant certaines de ces réclamations avaient déjà été examinées antérieurement et les parties intéressées avaient convenu que la question de la représentativité notamment des associations et centrales syndicales serait réglée différemment.

 Il y a donc eu un accord entre les parties pour que cette question soit réglée d'ici à 2015. Je pense qu'il n'est pas bon de revenir là-dessus dès lors qu'un accord intermédiaire a été trouvé sur ces questions. A ce stade, et pour le mandat actuel qui va démarrer, il est suffisant de terminer le processus électoral et immédiatement après de se mettre d'accord auprès des employeurs qu'il soit procédé à un vote permettant d'établir de façon indiscutable la représentativité de toutes les centrales syndicales.

Et il faudra faire la même chose, pour être juste, avec les ONG sinon la règle serait injuste et contraignante pour les uns et ne le serait pas pour les autres. Les élections ont eu lieu, dans quelques semaines, l'Etat va désigner ses 15 membres représentants et le bureau sera mis en place au Conseil économique et social ».